Groupe « Evaluation audit interne »

Ce groupe de travail est dirigé par Mme Marie-Christine Chassaigne, cadre supérieur de santé (05 61 77 83 83).

Audit prise en charge de la douleur au CHU

Publié le 13/11/2007 à 15h13 (mis à jour le 06/02/2012 à 14h53)

Evaluation de la prise en charge de la douleur au CHU de Toulouse

Auteurs :

  • Arseguet Evelyne, infirmière, chirurgie digestive - Purpan,
  • Lopez Ghyslaine, infirmière anesthésiste, SAU-déchocage - Rangueil.

Introduction

L’amélioration de la qualité de la prise en charge de la douleur est une préoccupation qui anime l’ensemble des équipes soignantes du CHU. Cette mission se formalise diversement au travers de réflexion d’équipe, d’élaboration de protocoles, de travaux de recherche.

Pour y répondre, un groupe de travail initié par la Commission du Service de Soins Infirmiers a vu le jour sous le nom de « Groupe douleur CSSI ». Il s’est enrichi dans le temps de nouveaux membres impliqués et/ou ressources, et notamment de la « cellule douleur aiguë » de Purpan. Il avait pour objectif de réaliser un état des lieux sur la douleur et être force de propositions et participer à la mise en œuvre de mesures correctives. Une enquête a été conduite en mars 2003 afin de répondre à l’objectif initial.
Dans le même temps, le CHU se dotait d’un Comité de Lutte contre la Douleur . Le groupe douleur a été rattaché à cette instance et officie à présent sous le terme : « Groupe Evaluation de la douleur ».

I. Méthodologie

Cet état des lieux a été réalisé dans 63 unités tirées au sort : Médecine, Chirurgie, Gériatrie et Salles de Soins Post Interventionnelles à partir d’une enquête visant les soignants et les soignés d’une même unité de soins.
Ces unités étaient réparties sur les sites de Rangueil, Purpan, Casselardit et Paule de Viguier.

Ont été exclus du tirage au sort : les blocs opératoires, les urgences, les consultations, les endoscopies, l’hôpital des enfants, la psychiatrie, la gériatrie long séjour.

L’enquête a été réalisée en avril 2003 :

  • Pour les soignés, un jour donné : le questionnaire anonyme a été remis à l ‘ensemble des personnes soignées communicantes présentes dans chaque unité soit 698 questionnaires distribués.
  • Pour les soignants, le questionnaire anonyme a été distribué à l’ensemble du personnel soignant de l’unité concernée soit 1238 questionnaires.

Les soignants avaient un délai de 15 jours pour y répondre.

II. Résultats

Les Cadres de Santé des unités sélectionnées ont permis de concrétiser sur le terrain la réflexion du groupe de travail. Le personnel soignant sollicité a contribué à fournir une banque de données riche d’enseignements.

Le taux de réponses s’élève à 71% pour les soignés et 77% pour les soignants.

Les résultats s’articulent autour de 3 axes où sont envisagés le point de vue des soignés et des soignants :

1. L’information sur la prise en charge de la douleur

L’information est considérée comme indispensable par les soignants. Ils relayent efficacement cet impératif sur le terrain en encourageant les patients à signaler leur douleur. Cependant plus du tiers des patients interrogés n’a pas bénéficié de cette information.

L’information délivrée, le plus souvent oralement par les soignants doit être améliorée. Des supports écrits pourraient venir en appui.

2. La prise en charge de la douleur

55% des soignés interrogés ont ressenti une douleur durant leur hospitalisation.

C’est sur cet échantillon de patients douloureux que repose notre constat.

L’évaluation

Pour 2/3 des soignés, l’évaluation de cette douleur varie de plus de 2h à 1 fois /jour. S’agissant de patients douloureux, cette fréquence ne parasite pas la considération qu’ils ont envers les soignants : ils estiment être satisfaits, voire très satisfaits, pour plus de 8/10 d’entre eux.

La douleur signalée par le soigné est prise en charge très rapidement à 87% dans un délai de 15 minutes . Cependant, l’efficacité du traitement administré l’est plus rarement, en considérant que l’évaluation est l’objectivation du niveau de la douleur, elle doit précéder et suivre le traitement.

La traçabilité de ce paramètre serait rendue plus lisible, s’il était considéré comme un critère de surveillance au même titre que la pression artérielle ou la température.

Pour 89% des soignants, le patient est considéré comme seul juge de sa douleur.

Les échelles d’évaluation les plus connues sont en premier lieu l’Echelle Visuelle Analogique (EVA) puis l’Echelle Verbale Simple (EVS), cependant l’EVS est la plus utilisée.

Les traitements antalgiques

Point de vue des soignés :

  • Le niveau « 0 douleur » attendu après un traitement antalgique se situe à 44% et à inférieur à 3 à 80%.
  • Le traitement mis en œuvre est majoritairement médicamenteux.
  • Pour 28% des patients, les actions mises en œuvre pour lutter contre leur douleur sont moyennement ,voire pas du tout efficaces.
  • La moitié d’entre eux pensent qu’un traitement non médicamenteux associé pourrait être efficace.
  • 19 % exprime une peur vis à vis de la morphine.

Point de vue des soignants :

  • Répondre à la douleur c’est avant tout consacrer du temps .
  • 47% des soignants estiment que le schéma d’administration des antalgiques le plus efficace reste la réponse à la demande du patient.
  • 33 % disposent de protocoles d’analgésie dans leur service.
  • Pour 56% des soignants, l’utilisation de la morphine fait partie de leur pratique habituelle.
  • 65% n’expriment aucune inquiétude à l’utiliser. Celle ci n’est plus entachée de peurs, elle est entrée dans une pratique professionnelle. Ce constat est corroboré par le peu de craintes exprimées par les soignés.
  • Si l’utilisation de la Pompe Auto Contrôlée (PCA) est admise comme une méthode efficace pour la majorité des soignants, elle n’est utilisée que par 29 % d’entre eux.

Au vu de ces résultats, les réponses des soignants peuvent éclairer ces réponses :

  • La prise en charge de la douleur par les soignants est essentiellement axée sur des traitements médicamenteux prescrits.
  • Les traitements non médicamenteux qui relèvent du rôle propre, tels que relaxation, sophrologie sont insuffisamment développés.

Niveau de satisfaction

La qualité de cette prise en charge est largement reconnue par les soignés : 83% considèrent que le personnel soignant a répondu à leurs demandes.
Pour 92% de soignants, le niveau de soulagement d’un traitement antalgique doit être optimal. Soignés comme soignants partagent une exigence de qualité quant à la prise en charge de la douleur : ensemble, ils jugent qu’il n’est pas normal de souffrir à l’hôpital.

Si les soignés ont une exigence sur l’attente d’une qualité de prise en charge, ils sont tolérants sur les moyens actuels mis en œuvre . Toutefois, les soignants portent un regard plus nuancé sur la qualité de cette prise en charge.

3. Les besoins exprimés par les soignants

La formation demeure le thème majeur évoqué.

Le défaut de mise à jour des connaissances imprègne les réponses des soignants tant du point de vue clinique que réglementaire . Conscients des lacunes dans ce domaine, ils expriment le désir de se former et souhaitent à 65% un référent douleur.

La demande s’exprime à 82% en adéquation avec un défaut de formation sur la prise en charge de la douleur admis à 78%.

Plusieurs axes de formation se dégagent autour de la législation sur la prise en charge de la douleur (méconnue à 69 %) ,la connaissance des différentes classes d’antalgiques et leurs schémas d’administration ainsi que les actions relevant du rôle propre.

Conclusion

La prise en charge de la douleur est un domaine évolutif et complexe
L’enquête a démontré l’importance de la qualité de la prise en charge de la douleur.

L’évaluation des pratiques professionnelles est nécessaire. Elle oriente précisément les mesures correctives que cette enquête a mise à jour :

  • L’amélioration de l’information sur la prise en charge de la douleur car la douleur n’est pas une fatalité et doit être combattue précocement et efficacement .
  • La formation est la mesure phare plébiscitée par le personnel soignant. Maintenir leurs aptitudes professionnelles impose au-delà d’un savoir faire et d’un savoir être, l’acquisition d’un savoir. L’amélioration de la qualité de la prise en charge de la douleur repose en grande partie sur la formation continue.

Communication, information, interdisciplinarité, synergie d’acteurs, voilà bien là les axes de travail et/ou de recherche du Comité de Lutte contre la Douleur. Un partenariat volontariste avec la formation continue concrétisera les attentes d’un personnel soignant à la recherche d’une amélioration constante de la qualité des soins.

Groupe de travail : Arseguet Evelyne, Boubée Régine, Cayrol Monique, Cellier Anne, Chassaigne Marie-Christine, Delanoue Khadija, Gadrat Françoise, Galland Marie-Christine, Lamonzie Jackie, Lopez Ghyslaine, Parayre Thomas, Quintard Martine, Sérignac Michelle, Vanaerde Chantal.

Bibliographie

Textes réglementaires

  • Décret n°2002.194 du 11 février 2002 relatif aux actes professionnels et à l’exercice de la profession d’infirmier.
  • Circulaire DHOS/E2 n° 2002- 266 du 30 avril 2002 relative à la mise en œuvre du programme national de lutte contre la douleur 2002-2005.
  • Circulaire DGS/SQ2 /DH/DAS n° 99-84 du 11 février 1999 relative à la mise en place de protocoles de prise en charge de la douleur aiguë par les équipes pluridisciplinaires médicales et soignantes des établissements de santé et institutions médico-sociales.
  • Lettre circulaire DH/EO 4 n° 05277 du 3 décembre 1998 relative au plan de lutte contre la douleur.
  • Circulaire DGS/DH n° 98-586 du 24 septembre 1998 relative à la mise en œuvre du plan triennal de lutte contre la douleur dans les établissements de santé.
  • Guide pour la mise en place d’un programme de lutte contre la douleur dans les établissements de santé - mai 2002 Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
  • Programme de lutte contre la douleur 2002-2005.

Revues

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