La Grave au XIXème siècle - l’essor de la médicalisation

Publié le 13/09/2004 à 11h22 (mis à jour le 09/07/2021 à 14h58)


Pinel à la Salpêtrière délivrant les enchaînés. Musée d’Histoire de la Médecine Toulouse
A la fin du XVIIIème siècle, l’Hôpital Général Saint-Joseph de La Grave voit naître un nouveau concept de la pauvreté qui vient remplacer celui de charité hérité du Moyen-Age : la bienfaisance ; c’est-à-dire la prise en charge des nécessiteux par les pouvoirs publics laïcs et non plus par l’Eglise.
L’« Hôpital Général » n’est plus, l’Hôpital Saint-Joseph de La Grave voit ses attributions se recentrer sur la seule médicalisation.

  • 1803, le Quartier de Force de La Grave qui était à la fois asile, prison et mouroir pour les femmes « vénériennes » et les prostituées, ferme définitivement ses portes [1].
  • 1814, 10 avril, bataille de Toulouse entre les armées françaises du Maréchal Soult et les coalisés anglo-espagnols de Wellington qui se solde par une victoire de ces derniers. Les hôpitaux militaires étant insuffisants pour accueillir le nombre de blessés, les lits de l’Hôtel-Dieu et La Grave ont été mis à disposition. Le 18 avril, Wellington visite les Hôpitaux et leur fait un don pour leur entretien.
  • 1815, le 20 février. Après avoir été persécutées et exclues des hôpitaux, il est décidé que le service de l’Hospice de La Grave serait exclusivement confié aux filles de Saint-Vincent de Paul à compter du 10 mars. Les autorités avaient compris que les Sœurs étaient indispensables dans les Hospices : « Elles assuraient à moindre frais tous les soins et apportaient aux malades le réconfort de la religion ».
  • 1838, une loi, inspirée par Philippe Pinel, médecin aliéniste (1745-1826), oblige chaque département à se doter d’un établissement spécialement destiné à recevoir et soigner les aliénés [2].
  • 1845, à La Grave, les travaux de la nouvelle chapelle commencés en 1758 sont enfin terminés. Le 14 mars, le premier office y est célébré.
  • 1863, achèvement de l’Asile de Braqueville ; le Pr. Marchant, ancien élève de Jean-Etienne Dominique Esquirol (1772-1840), médecin aliéniste élève de Pinel, en devient le directeur. La nouveauté réside dans le fait que cet établissement ne revêtait plus le caractère carcéral des quartiers de la Grave.
  • 1875, le 23 juin, l’inondation la plus meurtrière de l’Histoire toulousaineatteint tout le quartier Saint-Cyprien. L’Hôpital La Grave est inondé et les malades sont évacués vers la ville et l’hôpital militaire, certains même à l’Hôpital de Montpellier. La Grave est devenu une île sans communication par voie de terre avec son voisin l’Hôtel-Dieu. Il y avait 4 mètres d’eau dans les cours et les jardins ; une plaque commémorative rappelle encore aujourd’hui ce drame.
    On remet en état les salles d’hospitalisation mais globalement La Grave bénéficie de moins de reconstructions que son voisin l’Hôtel-Dieu.
  • 1876, début de la campagne de rénovation des Hôpitaux suite à l’inondation, campagne qui va durer jusqu’en 1893.
  • 1878, le Maréchal MacMahon, Président de la République, signe le décret établissant une Faculté mixte de Médecine et de Pharmacie à Toulouse.
  • 1889, installation de la Maternité à la Grave avec l’école d’accouchements (car trop de mortalité à l’Hôtel-Dieu).
  • 1890, 20 lits sont créés à la Grave pour le soin des aliénés, côté rue Réclusane [3].
  • 1891, le 3 novembre, une proposition du Conseil Municipal, largement anticlérical, demande le retrait de toutes les Religieuses des services hospitaliers, en prétextant des économies budgétaires ; c’est le début du long débat sur la laïcisation des Hospices.
  • 1893, inauguration de l’Ecole d’accouchements de La Grave [4].
  • 1889, la Maternité s’installe à La Grave car les infections nosocomiales et puerpérales à l’Hôtel-Dieu prenaient des proportions catastrophiques.

La fin du XIXème siècle est marquée pour les Hôpitaux de Toulouse par la laïcisation progressive des services. On évoque pour la première fois en 1899 la nécessité d’avoir dans les villes, qui ont vu les facultés de Médecine s’ouvrir, une école d’Infirmières. Les soins allaient, dans un contexte de progrès médicaux croissants, se professionnaliser et faire l’objet d’un diplôme d’Etat.
Regroupant un total de 900 lits, La Grave comptait à la fin du XIXème siècle des quartiers de vieillards, valides ou infirmes ; deux quartiers de fous et d’épileptiques ; deux quartiers d’enfants et quatre services de malades. C’était toujours une maison pour les pauvres mais sa dimension médicale allait prendre son essor.

[1Déjà en 1778, les vénériennes avaient été transférées à l’Hôtel-Dieu pour bénéficier d’un suivi médical, mais rapatriées sur La Grave en 1817

[2les aliénés ne sont alors plus considérés comme des « déments punis par Dieu » mais comme des malades :« Loin d’être des coupables qu’il faut punir, ils sont des malades dont l’état pénible mérite tous les égards dus à l’Humanité souffrante » (Pinel).

[3Cette clinique surnommée la « Mentale » a été établie pour l’enseignement des étudiants en médecine

[4Une loi du 15 juillet de cette année instaure l’Assistance Médicale Gratuite