Chirurgie de l’épilepsie

L’épilepsie est définie par la récidive de crises épileptiques non provoquées. Sa prévalence est de 0,5 à 1% en France, soit approximativement 400 000 patients. Et environ 30% des patients épileptiques ne répondent pas bien à un traitement médical bien conduit, ce qui fait estimer le nombre de patients dits « pharmaco-résistants » à 80 000 à 120 000.

La chirurgie de l’épilepsie est possible dans certains cas d’épilepsie pharmaco-résistante et peut mener à un contrôle complet des crises. Un bilan pré-chirurgical est cependant nécessaire afin de confirmer le diagnostic, de localiser le foyer épileptique et préciser les risques de la chirurgie en terme de séquelles neurologiques et cognitives. Chez les enfants, la chirurgie de l’épilepsie, si elle est effectuée de façon précoce, permet souvent d’améliorer le développement cognitif et la scolarité.

Seuls quelques centres (moins de 20) en France possèdent l’expertise requise pour pratiquer cette chirurgie de l’épilepsie. L’équipe du Dr Luc Valton (département de neurologie du CHU de Toulouse) prend en charge les épilepsies sur le versant médical et travaille de concert avec le service de neurochirurgie (Pr Jean-Christophe Sol et le Dr Amaury De Barros) quand un traitement chirurgical est décidé. Ces deux neurochirurgiens sont spécialisés dans la chirurgie fonctionnelle.

Quels sont les candidats à une chirurgie de l’épilepsie ?

Publié le 31/03/2021 à 14h23 (mis à jour le 31/03/2021 à 14h26)

Tous les patients avec une épilepsie pharmaco-résistante devraient bénéficier d’une évaluation dans un centre spécialisé. Une épilepsie est considérée comme pharmaco-résistante, lorsque les crises d’épilepsie persistent malgré l’essai d’au moins deux médicaments antiépileptiques utilisés à posologie efficace.

Il existe de multiples causes (étiologies) pouvant mener à l’apparition d’une épilepsie. Les étiologies peuvent varier selon l’âge de début de la maladie épileptique, mais peuvent faire intervenir des causes génétiques, structurelles, infectieuses, métaboliques, auto-immunes, vasculaires, tumorales, post-traumatiques ou neurodégénératives.

Par ailleurs, les premières évaluations cliniques et électroencéphalographiques viennent différencier les épilepsies généralisées (réseau épileptogène diffus au sein du cerveau) des épilepsies focales (point de départ des crises localisé à une zone anatomique précise).

Environ 60% des épilepsies focales sans étiologie tumorale ou vasculaire sous-jacente provient du lobe temporal. Fréquemment, ce type d’épilepsie est associée à une sclérose de l’hippocampe (structure interne du lobe temporal impliquée dans la mémoire).

En cas de suspicion d’épilepsie focale, les patients sont orientés vers un bilan pré-chirurgical poussé visant :

  • D’une part à mieux caractériser les limites anatomiques de la zone épileptogène,
  • D’autre part à évaluer sa proximité avec des zones cérébrales « fonctionnelles », afin d’apprécier son opérabilité (c’est-à-dire d’une part l’efficacité, d’autre part les risques de la chirurgie proposée).

Ainsi, le type de chirurgie proposé varie en fonction de plusieurs critères, en premier lieu de la localisation de la zone épileptogène, mais aussi du type de crise et de l’étiologie suspectée.

Mais le plus souvent, définir la localisation de la zone épileptogène est une démarche complexe, spécialisée, car elle n’est pas forcément limitée à la zone lésionnelle. C’est l’objectif du bilan épileptologique pré-chirurgical.

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En quoi consiste le bilan pré-chirurgical ?

Publié le 31/03/2021 à 14h23 (mis à jour le 31/03/2021 à 14h29)

Le bilan pré-chirurgical est réalisé dans le département de neurologie. Il a pour but de :

  1. Confirmer le diagnostique d’épilepsie focale
  2. Localiser la zone épileptogène de façon précise afin d’envisager un geste chirurgical de façon précise en limitant les risques opératoires.

Ce bilan comprend la réalisation d’une batterie d’examens paracliniques réalisés lors d’une courte hospitalisation de 7 jours en moyenne dans le département de neurologie.

Il comprend au moins :

  • Une télémétrie vidéo-électroencéphalogramme (vidéo-EEG) prolongée avec enregistrement des crises,
  • Une IRM cérébrale,
  • Des examens de médecine nucléaire (TEP et TEMP).
  • Un bilan neuropsychologique et psychiatrique

Le bilan épileptiologique pré-chirurgicalpermet d’évaluer, outre la zone épileptogène, les fonctions cérébrales intègres aux alentours du foyer épileptique afin d’évaluer le risque de séquelles postopératoires et de définir la meilleure stratégie chirurgicale.

Dans 10 à 20% des cas, ces examens restent insuffisants pour identifier précisément le foyer épileptique et/ou les zones fonctionnelles essentielles. Il est alors nécessaire de procéder à l’implantation d’électrodes intracrâniennes par voie stéréotaxique par un neurochirurgien, technique dite de stéréo-électroencéphalographie (SEEG).

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Qu’est-ce que la stéréo-électroencéphalographie (SEEG) ?

Publié le 31/03/2021 à 14h23 (mis à jour le 31/03/2021 à 17h13)

La SEEG est une technique développée en France durant les années 60, avant de se développer progressivement à travers le monde. Elle permet de venir implanter avec une précision millimétrique des électrodes au sein du cerveau afin de recueillir l’activité électrique des neurones. Elle fait intervenir un cadre de stéréotaxie permettant un recalage de chaque point du crâne dans un espace stéréotaxique (plus d’information concernant la stéréotaxie sur la page dévolue à la stimulation cérébrale profonde).

L’implantation des électrodes intracérébrales est aujourd’hui réalisée à l’aide d’un robot chirurgical.


Robot Neuromate (RENISHAW) utilisé au CHU de Toulouse pour la SEEG

Les enregistrements SEEG se font sur plusieurs jours dans l’unité des explorations neurophysiologiques (département de neurologie).

Des thermocoagulations des zones épileptogènes peuvent être réalisées par l’intermédiaire des électrodes intracrâniennes.

Après intégration de tous les résultats, une indication opératoire est retenue chez environ 60% des patients (adultes ou enfants).

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Quelles sont les techniques chirurgicales utilisées ?

Publié le 31/03/2021 à 14h23 (mis à jour le 31/03/2021 à 14h31)

En fonction du type de crise d’épilepsie (focale ou généralisée), de l’étiologie et de la localisation anatomique, plusieurs types de procédures peuvent être proposés pour une chirurgie de l’épilepsie :

  • Chirurgie curative
  • Chirurgie palliative

Chirurgie curative

Cette chirurgie permet la résection du tissu cérébral anormal dans le but d’obtenir l’arrêt des crises épileptiques.

Toutes les techniques neurochirurgicales et microchirurgicales modernes (neuronavigation, chirurgie en condition éveillée, monitoring électrophysiologique, microscope opératoire, bistouri à ultrason…) peuvent être utilisées pour minimiser les risques opératoires, tout en maximisant le contrôle de l’épilepsie.

Différentes stratégies chirurgicales sont possibles selon la localisation, la lésion sous-jacente et l’étendue de la zone épileptogène.

  • Dans l’épilepsie de la face mésiale du lobe temporal, avec sclérose de l’hippocampe, la technique standard est la résection temporale antérieure, avec résection du tiers antérieur du lobe temporal, de l’amygdale, de l’hippocampe et du gyrus parahippocampique. Il s’agit de l’intervention curative la plus fréquemment réalisée.
  • En cas de foyer cortical autre, on pratiquera une résection de la zone délimitée lors du bilan pré-chirurgical en particulier la SEEG tout en préservant les zones neurologiques de haute importance fonctionnelle. Le cas échéant une résection lobaire ou multilobaire en cas de lésion étendue peut être proposée.

Chirurgie paliative

Cette chirurgie a pour but de limiter la diffusion des décharges épileptiques en interrompant certaines connections. Elles peuvent être envisagées quand on ne peut faire aucune hypothèse satisfaisante sur l’existence d’un foyer épileptogène unique, ou bien s’il existe des foyers multiples bilatéraux, ou encore si la zone épileptogène est très étendue et recouvre des zones fonctionnelles dont on ne peut pas faire l’exérèse.

Ces techniques ne cherchent pas à guérir l’épilepsie mais visent à réduire la fréquence et l’intensité des crises d’épilepsie. L’un des buts essentiels et de supprimer la diffusion des crises qui entraînent des chutes, permettant ainsi d’améliorer la vie quotidienne des patients et de prévenir les blessures. Parmi les techniques de chirurgie palliative de l’épilepsie, on trouve :

  • La callosotomie consiste à couper par la chirurgie ou par radiochirurgie les fibres du corps calleux, reliant les deux hémisphères cérébraux.
  • La stimulation du nerf vague peut apporter une amélioration de la fréquence et de l’intensité des crises. Un stimulateur est implanté sous la clavicule gauche et une électrode part du stimulateur vers le nerf vague, dans le cou. Une quinzaine de jours après l’intervention, le médecin procédera à la mise en route de la stimulation, qui doit être adaptée à chaque malade.
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Quels sont les résultats de la chirurgie de l’épilepsie ?

Publié le 31/03/2021 à 14h23

Les résultats de la chirurgie de l’épilepsie varient en fonction de :

  • La pathologie,
  • La localisation du foyer épileptogène,
  • L’âge du patient.

Les résultats à long terme suggèrent une absence de crises chez :

  • 50 à 80% des patients avec sclérose hippocampique
  • 35 à 75% dans les épilepsies lésionnelles extra-temporales. Les résultats étant un peu moins bons en cas d’absence de lésion.

Un âge plus jeune et une durée de la maladie plus courte augmentent les chances de supprimer complètement les crises.

Chez les enfants, le bénéfice d’une chirurgie non retardée est encore plus évident avec une plus grande plasticité cérébrale et un effet du contrôle des crises sur le développement cognitif et la scolarité.

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Quels sont les risques de la chirurgie de l’épilepsie ?

Publié le 31/03/2021 à 14h23

Les risques de la chirurgie de l’épilepsie sont à apprécier en fonction des risques d’évolution de l’épilepsie à long terme. Lorsque les crises cliniques sont fréquentes ou le foyer électroencéphalographique très actif, une perturbation cognitive et/ou mnésique peut être causée par l’activité épileptique elle-même, ou la prise d’une polythérapie antiépileptique. La chirurgie peut alors permettre une amélioration des fonctions touchées.

Les risques de la chirurgie comprennent les risques liés à toute intervention neurochirurgicale cérébrale (infection, ischémie, hémorragie) qui se situent aux alentours de 2%.

À cela, s’ajoutent les risques spécifiques de déficit neurologique / cognitif postopératoire, liés à la résection elle-même et qui doivent être évalués de manière individuelle, en relation avec la région cérébrale visée par l’intervention.

Dans le cas fréquent de l’épilepsie temporale, le risque concerne la mémoire, surtout si la résection vise l’hémisphère dominant pour le langage (le plus souvent à gauche). En particulier, en cas d’absence de lésion ou lorsque la mémoire est normale avant l’intervention, ces troubles sont très souvent améliorés après rééducation orthophonique.

Il existe également un risque de déficit partiel du champ visuel par atteinte des voies optiques. Ces déficits se situent essentiellement au niveau du champ visuel supéro-latéral controlatéral à la chirurgie et n’occasionnent qu’un handicap minime au quotidien chez les patients.

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En pratique, comment se déroule l’hospitalisation pour une chirurgie de l’épilepsie ?

Publié le 31/03/2021 à 14h23

Au CHU de Toulouse, en vue d’une chirurgie de l’épilepsie, l’évaluation pré-chirurgicale va nécessiter plusieurs hospitalisations dans le département de neurologie ou dans le service de neurochirurgie :

  • La première étape consiste à enregistrer les crises en vidéo-EEG prolongé (bilan de phase 1). L’hospitalisation dans l’unité des explorations neurophysiologiques, dure habituellement 3 à 5 jours. Il existe à l’heure actuelle trois chambres de vidéo-EEG avec un lit d’accompagnant. Il est parfois nécessaire de renouveler cet enregistrement de phase 1. Les résultats de ces explorations sont confrontés au reste du bilan épileptologique (en particulier aux imageries cérébrales morphologiques et fonctionnelles). Cela peut permettre d’envisager d’emblée la réalisation d’une chirurgie de l’épilepsie, une contre-indication à la chirurgie, ou conclure à la nécessité de compléter les explorations pour préciser la localisation de la zone épileptogène.
  • Si cette première phase confirme qu’il s’agit bien d’une épilepsie focale, mais que le foyer épileptique n’a pu être défini de façon précise, cela peut être complété par une exploration SEEG, qui repose sur l’enregistrement de l’EEG au moyen d’électrodes implantées en intracrânien. Cette exploration (bilan de phase 2), nécessite une hospitalisation qui dure 10 à 21 jours en moyenne.
  • L’intervention neurochirurgicale nécessitera une 3e hospitalisation de 10 jours en moyenne, avec une nuit en réanimation lorsqu’il s’agit d’une chirurgie curative.

Le suivi post-opératoire se fait en ambulatoire. Il associe une surveillance neurochirugicale et épileptologique rapprochée au cours des 6 premiers mois, puis plus espacée au-delà.

Un bilan est réalisé 3 à 6 mois après l’intervention avec une consultation auprès du neurologue et du neurochirurgien, un EEG standard, une IRM cérébrale, un bilan neuropsychologique.

Si tous les critères de guérison sont bons, il est décidé d’une décroissance progressive des médicaments antiépileptiques. Le patient reprend par ailleurs son suivi habituel avec son neurologue traitant.

C’est donc un ensemble de compétences humaines et techniques qui permettront si vous êtes candidat à une chirurgie de l’épilepsie, d’être traité au CHU de Toulouse par le service de neurochirurgie, en lien avec l’unité d’épileptologie du département de neurologie du CHU de Toulouse (cf. Prise en charge de l’épilepsie au CHU de Toulouse).

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