Stimulation cérébrale profonde

La stimulation cérébrale profonde (SCP) est une technique chirurgicale mise au point et développée en France à la fin des années 1980 par l’équipe des Professeurs Alim-Louis Benabid (neurochirurgien) et Pierre Pollak (neurologue) au CHU de Grenoble.

Leur idée initiale était de diminuer la lourdeur et les conséquences d’une chirurgie lésionnelle (la thalamotomie) dans le traitement des tremblements, grâce à l’aspect fonctionnel de la stimulation cérébrale profonde, qui est réversible et dont les paramètres électriques sont ajustables.

Les indications du traitement se sont progressivement affinées grâce à de nombreuses études scientifiques permettant de démontrer son efficacité et sa bonne tolérance. Aujourd’hui, 60 000 patients ont déjà bénéficié de ce traitement dans le monde. En France, 22 centres réalisent régulièrement des implantations d’électrodes de stimulation cérébrale profonde.

Qu’est-ce que la stimulation cérébrale profonde ?

Publié le 31/03/2021 à 17h08

Elle consiste à implanter des électrodes dans une zone cible précise du cerveau afin de délivrer une stimulation électrique à haute fréquence et faible intensité dans cette zone cible à partir d’un boitier stimulateur miniaturisé implanté dans la région pectorale ou abdominale. C’est une technique de neuromodulation fonctionnelle des réseaux de neurones dans le cerveau. Elle est dite réversible car elle n’induit pas de lésion définitive du tissu cérébral et on peut l’arrêter transitoirement ou définitivement par l’arrêt du stimulateur et/ou retrait des électrodes implantées.

Pour mener à bien cette procédure chirurgicale, nous réalisons l’intervention en conditions stéréotaxiques. La stéréotaxie (du grec ancien stereos = ferme, dur, et qui par extension renvoie à l’idée d’espace tridimensionnel et du grec ancien taxis = arrangement) est une technique utilisée de longue date en neurochirurgie. Le principe général est de recaler chaque point du crâne du patient dans un espace de référence. En d’autres termes, nous définissons, pour chaque point situé à l’intérieur d’un cadre de stéréotaxie, une coordonnée cartésienne en X, Y et Z. Ainsi, nous pouvons atteindre une cible en profondeur dans le cerveau avec une précision infra-millimétrique.

L’importance du cadre de stéréotaxie

Une grande partie du bon déroulement de la procédure repose donc sur le cadre de stéréotaxie. Il est l’élément indispensable qui assure la précision géométrique de la technique.

Ce cadre est utilisé pour :

  1. Soutenir et immobiliser la tête pendant toute la durée des examens neuroradiologiques de repérage de « la cible » et de l’implantation chirurgicale.
  2. Repérer avec une précision infra-millimétrique la position de la cible intracrânienne à viser dans les trois plans de l’espace.


Cadre de stéréotaxie

Les mécanismes exacts de la neuromodulation cérébrale induite par la stimulation cérébrale profonde (SCP) sont encore à l’heure actuelle imparfaitement connus, mais on sait qu’elle module de façon bénéfique le fonctionnement de réseaux neuronaux devenus pathologiques du fait de la maladie.

Pathologies traitées

Les pathologies couramment prises en charge par la SCP sont :

Les cibles anatomiques (noyau subthalamique, globus pallidus interne, thalamus…) sont définies par les experts de façon collégiale et pluridisciplinaire, en fonction de la pathologie, des signes cliniques et de l’état général du patient et des données neuroradiologiques. La SCP est en effet, un traitement qui réclame une approche multidisciplinaire avec l’intervention de nombreux partenaires experts (neurochirurgiens, neurologues, neuroradiologues, neuropsychologues, neurophysiologistes, psychiatres, …).

La SCP est également proposée dans d’autres pathologies, mais qui relèvent encore à l’heure actuelle du domaine de la recherche clinique telle que la dépression sévère pharmaco-résistante, la maladie Gilles de la Tourette, les troubles obsessionnels compulsifs sévères (TOCs), l’anorexie mentale ou certaines formes d’épilepsie pharmaco-résistantes. Dans ce cas, elles sont réalisées de façon très « encadrées » par un protocole de recherche spécifique.

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Pathologies prises en charge par stimulation cérébrale profonde

Publié le 31/03/2021 à 17h08 (mis à jour le 31/03/2021 à 17h10)

Au CHU de Toulouse, le service de neurochirurgie propose « en routine » la stimulation cérébrale profonde aux patients souffrant de maladies neurologiques avec des troubles du mouvement (maladie de Parkinson, tremblement essentiel et dystonie).

La sélection des patients éligibles à une stimulation cérébrale profonde se fait grâce à un bilan préopératoire exhaustif permettant de vérifier les contre-indications à la réalisation du geste chirurgical et relève d’une équipe spécialisée pluridisciplinaire de CHU.

Maladie de Parkinson

La stimulation cérébrale profonde est proposée aux patients souffrant d’une maladie de Parkinson idiopathique depuis au moins 5 ans et présentant des variations invalidantes d’efficacité de leur traitement anti-parkinsonien (fluctuations d’efficacité, c’est à dire que l’effet du traitement est limité dans le temps et /ou dyskinésies, c’est à dire mouvements anormaux induits par le traitement). Dans ce cas, la cible la plus fréquemment visée est le noyau subthalamique.

Tremblement essentiel

La stimulation cérébrale profonde est également proposée aux patients souffrant de tremblement essentiel sévère et invalidant au quotidien. Il s’agit d’une pathologie très fréquente après 60 ans pouvant être source de limitations d’activités, avec une altération sévère de la qualité de vie. Lorsque la maladie n’est pas contrôlée par les traitements médicamenteux, et retentit sur la vie sociale ou professionnelle du patient, une stimulation cérébrale profonde peut alors être proposée. Dans cette indication, la cible proposée est le thalamus.

Dystonie

Les patients souffrant de dystonie segmentaire ou généralisée sévère invalidante (maladie rare aux multiples étiologies), peuvent également se voir proposer un geste de stimulation cérébrale profonde. Dans cette indication, la cible proposée est le globus pallidus interne.

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Une équipe pluridisciplinaire pour la stimulation cérébrale profonde

Publié le 31/03/2021 à 17h08 (mis à jour le 31/03/2021 à 17h10)

Les patients sont adressés en premier lieu aux médecins neurologues du CHU de Toulouse (centre expert Parkinson et consultations spécialisées mouvements anormaux (tremblement et dystonie)).

Bilan d’opérabilité

Si l’indication d’une SCP peut être envisagée au cours de cette première consultation ou au cours du suivi du patient, un bilan d’opérabilité est proposé au patient éligible. Il comprend :

  • Un bilan moteur (échelles d’évaluation de la sévérité et du handicap entrainé par le trouble moteur, avec dans le cas de la maladie de Parkinson une évaluation avec et sans traitement dopaminergique, test pharmacologique de réponse à la L-DOPA),
  • Un bilan neuro-cognitif,
  • Une consultation de psychiatrie,
  • La recherche de foyers infectieux,
  • Une IRM du cerveau.

À l’issue de ce bilan d’opérabilité, les patients qui sont éligibles (pour lesquels aucune contre-indication évidente n’a été identifiée) sont orientés vers une réunion de concertation multidisciplinaire (RCP) dédiée à la stimulation cérébrale profonde.

Consultation multidisciplinaire

Cette consultation spécialisée multidisciplinaire réunit divers intervenants :

  • Le patient éligible accompagné d’un proche
  • Des médecins neurologues
  • Un neurochirurgien
  • Un psychiatre
  • Un neuroradiologue
  • Des internes en formation
  • Une infirmière spécialisée en SCP

La consultation multidisciplinaire a pour but de :

  1. Vérifier l’absence de contre-indications formelles à la réalisation du geste chirurgical
  2. Évaluer la motivation du patient pour bénéficier de la SCP
  3. Lui expliquer clairement les objectifs thérapeutiques de la SCP et les bénéfices qu’il peut en attendre dans son cas particulier
  4. L’informer clairement des risques attendus liés au geste chirurgical ou à la stimulation en post-opératoire (Cf Paragraphe 5)
  5. Vérifier sa bonne compréhension des risques liés à la procédure et d’une bonne adéquation entre ses attentes et le bénéfice qu’il pourra obtenir du traitement chirurgical
  6. Choisir le type d’anesthésie (sédation légère intermittente ou anesthésie générale)
  7. Enfin, si le patient n’est pas éligible à la SCP, lui expliquer clairement ainsi qu’à ses proches, les raisons qui ont motivé cette décision prise en RCP.

Si la SCP est validée ...

A l’issue de la consultation multidisciplinaire, si le patient a donné son accord pour la réalisation de la SCP, il est mis sur une liste d’attente. Il est prévenu en moyenne 2 mois avant la date de l’opération. Durant la période d’attente de l’opération, il peut, s’il le souhaite :

  • Commencer à faire de l’éducation thérapeutique pour éviter les effets de surprise,
  • Acquérir des « savoir-faire, savoir gérer, savoir vivre » avec la SCP. C’est pour lui aussi l’occasion d’exprimer ses angoisses éventuelles face au geste chirurgical et de se projeter dans « l’après » chirurgie.
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Grands principes de la chirurgie par stimulation cérébrale profonde

Publié le 31/03/2021 à 17h08

Pré-opératoire

Au CHU de Toulouse, en vue d’une stimulation cérébrale profonde (SCP), les patients :

  • Revoient en consultation le neurochirurgien environ 1 mois avant la date de chirurgie
  • Ont une consultation avec les médecins anesthésistes environ 15 jours avant la chirurgie.

L’entrée en hospitalisation se fait une semaine avant la date opératoire. Une IRM multimodale de haut champ est alors renouvelée au cours de celle-ci qui permettra aux neuroradiologues et neurochirurgiens de repérer les cibles anatomiques choisies. Une évaluation de la gêne liée aux symptômes est à nouveau réalisée. De plus, le patient est pris en charge par l’infirmière spécialisée de la SCP, l’infirmier anesthésiste hypnothérapeute et la sophrologue.

Pour les patients le désirant, l’équipe d’infirmières anesthésistes du CHU proposent un accompagnement par hypnose permettant de diminuer l’anxiété, tout comme la douleur ressentie et ainsi améliorer le vécu de cette procédure. En cas de bonne réponse du patient, l’accompagnement par hypnose se poursuit tout au long de l’acte opératoire, si l’intervention est réalisée sans anesthésie générale (sous sédation légère intermittente).

Pose du cadre de stéréotaxie

Le jour de l’intervention, la première étape de la chirurgie consiste en la mise en place du cadre de stéréotaxie sous anesthésie locale.

Imagerie stéréotaxique

Une fois le cadre posé, les patients sortent du bloc opératoire pour rejoindre le service de neuroradiologie afin de réaliser de manière concomitante, une nouvelle IRM puis un scanner en conditions stéréotaxiques. Le bon déroulement de ces examens est une étape clé de la réussite de la procédure.

Ces deux imageries sont par la suite mises en correspondance avec l’IRM réalisée la semaine avant l’intervention. Ainsi neuroradiologues et neurochirurgiens définissent les coordonnées stéréotaxiques de la cible, ainsi que la trajectoire d‘implantation à réaliser afin d’éviter les structures critiques du cerveau, en particulier les vaisseaux.

Durant ce temps de calcul, le patient est redirigé vers le bloc opératoire et installé à plat dos le plus confortablement possible sur la table opératoire par les équipes d’infirmier(e)s.

Implantation des électrodes intracérébrales

L’implantation des électrodes intracérébrales se fait en deux temps :

  1. La mise en place de micro-électrodes temporaires (2 à 5) qui permettent d’enregistrer l’activité électrophysiologique des neurones. La descente des électrodes au sein du cerveau est contrôlée par un microdescendeur, permettant une avancée micrométrique des électrodes ;
  2. La signature électrique des neurones que l’on cherche à atteindre est reconnue par le neurophysiologiste et cet enregistrement permet d’affiner le calcul de la meilleure trajectoire ou de corriger d’éventuelles distorsions liées au repérage de la cible préopératoire « à crâne fermé ». Ces micro-électrodes de test permettent également, si le patient n’est pas sous anesthésie générale, de réaliser des stimulations électriques de la zone cible afin de tester cliniquement leur effet sur les signes moteurs de la maladie et de rechercher la survenue d’éventuelles manifestations neurologiques liées à la stimulation des zones voisines de la zone d’implantation.

A toutes les étapes de l’implantation des électrodes, le neurochirurgien peut décider de réaliser une imagerie per-opératoire afin de vérifier la position des électrodes dans les différents plans de l’espace.

Le choix de la « meilleure » trajectoire se fait sur un faisceau d’arguments basés sur le résultat :

  • Des enregistrements électrophysiologiques,
  • De la réponse clinique à la stimulation quand elle est évaluable si le patient n’est pas sous anesthésie générale
  • Des données radiologiques pré et per-opératoires.

Une fois ce choix fait, en concertation entre le neurochirurgien, le neurophysiologiste et le neurologue présents au bloc opératoire, les micro-électrodes de test sont retirées et l’électrode définitive est implantée sur la trajectoire choisie.

La mise en place de l’électrode définitive sur la trajectoire idéale est contrôlée au bloc opératoire par une imagerie.


Stimulation cérébrale profonde
© Lead-dbs.org : image licence creative commons

Mise en place du boitier de stimulation

La troisième étape chirurgicale consiste en la mise en place du générateur (la « pile » ou boitier de stimulation). Elle est toujours réalisée sous anesthésie générale. Le boitier de stimulation peut être implanté en position pectorale à l’instar d’un pace-maker cardiaque, ou en position abdominale. La localisation du générateur est discutée avant la chirurgie conjointement entre le neurochirurgien et le patient.

Le boitier de stimulation est connecté par le biais d’extensions aux électrodes cérébrales. L’ensemble du dispositif est interne. Les extensions présentent un trajet sous-cutané rétro-auriculaire au niveau du crâne, puis vont rejoindre le générateur.

Il existe deux types de boitiers :

  1. des boitiers dont la batterie est rechargeable (comme celle d’un smartphone)
  2. des boitiers dont la batterie n’est pas rechargeable et qui doivent être remplacés tous les 3 à 5 ans en moyenne en fonction des paramètres d’intensité de stimulation utilisés en post-opératoire.

Le choix entre les deux types de boitiers disponibles sur le marché est fait en amont de l’intervention avec le patient et le neurochirurgien.

Post-opératoire

Les patients sont surveillés quelques heures en salle de soin post-interventionnels, comme pour toute intervention chirurgicale.

La mise en route du système de stimulation se fait en général le jour même de l’intervention.

La durée d’hospitalisation post-opératoire est d’environ 2 semaines et elle se fait dans le département de neurologie sur le site hospitalier de Purpan. Au cours de celle-ci, les paramètres de stimulation définitive sont progressivement ajustés aux besoins du patient par l’équipe de neurologues et les traitements médicamenteux adaptés.

Cette hospitalisation permet aussi une surveillance du patient pour :

  • Dépister précocement toute complication chirurgicale retardée,
  • Réaliser les premiers soins de cicatrice,
  • Envisager le suivi post-opératoire à distance.

Puis de manière régulière, les patients sont revus en consultation par l’équipe de neurologie afin d’optimiser les paramètres de stimulation et les prises médicamenteuses.

Le neurochirurgien revoit les patients 2 mois environ après l’intervention, en l’absence de toute complication intercurrente.

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Bénéfices / risques de la stimulation cérébrale profonde

Publié le 31/03/2021 à 17h08 (mis à jour le 31/03/2021 à 17h10)

Les bénéfices et les risques de la stimulation cérébrale profonde sont exposés de manière claire et loyale en consultation multidisciplinaire. Ils peuvent varier en fonction :

  • Des pathologies et de la cible anatomique choisie
  • Du cas particulier de chaque patient.

Bénéfices

En terme de bénéfices, de manière indépendante à la pathologie, il s’agit d’un traitement chirurgical à visée symptomatique. Il permet d’améliorer les symptômes spécifiquement ciblés lors de la consultation multi-disciplinaire préopératoire, sans les guérir, ni ralentir l’évolution de la pathologie, si elle doit évoluer.

Risques

En terme de risques, trois risques principaux peuvent se rencontrer quelle que soit la cible anatomique choisie :

  1. Le risque hémorragique peropératoire ou post-opératoire précoce ;
  2. Le risque infectieux en regard du matériel de stimulation ;
  3. L’imprécision relative au bon positionnement des électrodes dans la cible.

Cas particulier de chaque patient

Les autre bénéfices et risques seront spécifiques pour un patient donné, une pathologie donnée et une cible anatomique donnée. Ils sont clairement exposés et expliqués au patient lors de la consultation multi-disciplinaire.

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